Les acteurs français de l’électronique inquiets des mauvais résultats de l’Allemagne
Le baromètre trimestriel de l’électronique d’Acsiel reflète les inquiétudes de ses adhérents – qu’ils soient fournisseurs de composants ou de biens d’équipement – en ce début d’année 2024, inquiétudes liées en grande partie au ralentissement de l’économie allemande.
Comme chaque trimestre depuis 2027, Acsiel vient de publier son baromètre de l’électronique pour le quatrième trimestre 2023, qui agrège les ventes de la filière électronique en France en se basant sur les résultats de ses adhérents. Ce baromètre associe deux indices, l’un relatif aux ventes de composants électroniques (semiconducteurs, passifs, circuits imprimés, connectique) et de consommables (crèmes à braser, flux, accessoires) destinés à l’industrie, l’autre aux ventes de biens d’équipement pour l’industrie électronique (équipements de test et mesure électroniques, équipements de production de cartes électroniques).
L’indice Acsiel des composants électroniques et des consommables a retrouvé la croissance au 4è trimestre, avec une progression de 5% par rapport au trimestre précédent. Toutefois, en variation annuelle, l’indice est orienté à la baisse (-6%). Globalement, Acsiel constate que l’indice a fortement progressé au cours des deux dernières années et se situait, au 4è trimestre 2023, 28% au-dessus de son niveau du 4è trimestre 2021. Le syndicat professionnel y voit une réaction à la pénurie et aux allocations qui ont sévi lors de la forte reprise post-Covid, entraînant des constitutions de stocks supérieurs aux besoins du marché. Avec pour conséquence une correction des stocks qui a nettement impacté les 2è et 3è trimestres 2023 et qui est bien avancée, mais pas encore achevée.
Mais depuis le 4è trimestre 2023, les prises de commande et la confiance sont en baisse, reflétant des perspectives économiques moins favorables qu’en 2023, selon Acsiel. Le ralentissement de l’économie allemande et ses répercussions prévisibles sur la croissance française sont au cœur des préoccupations de nombreux acteurs qui témoignent que le deuxième semestre 2023 et le début de 2024 n’ont pas été bons outre-Rhin.
Les signes de ralentissement en France sont perceptibles depuis le 4è trimestre en particulier dans les secteurs industriel et automobile, tandis que le secteur des télécoms subit une crise mondiale, avec une chute des investissements en France qualifiée de « vertigineuse » par Acsiel. A l’inverse, les secteurs de la défense et de l’avionique sont en pleine dynamique avec des délais de livraison des composants parfois très allongés.
Quant à l’indice Acsiel des biens d’équipement pour l’industrie électronique, il a connu une forte croissance séquentielle (+56%) au 4è trimestre 2023, qui a largement effacé la chute du trimestre précédent. Ce rebond de fin d’année a propulsé la croissance du trimestre à +20% en glissement annuel, après le repli de 24% observé au 3è trimestre.
Acsiel note en effet que des investissements importants ont été planifiés et réalisés dans la perspective de 2024. En particulier, des grands contrats ont conduit à un niveau élevé, voire exceptionnel, de livraisons et de facturations fin 2023.
Mais 2024 a débuté sur une note nettement moins favorable. La confiance est, là aussi, en baisse, tout comme les commandes. A l’instar des fabricants de composants, les fournisseurs d’équipements sont inquiets de la dégradation de la conjoncture allemande.
En France, la demande dans l’automobile reste dynamique dans certains domaines tels que l’Adas (systèmes d’aide à la conduite) ou les testeurs de batteries, mais ce secteur s’avère globalement moins bien orienté qu’au cours des trois années écoulées. De leur côté, les télécoms sont arrivées à la fin d’un cycle d’investissement et la 5G n’a pas encore pris le relai alors que beaucoup de questions subsistent sur le financement des investissements et l’équilibre du modèle économique, souligne Acsiel
Les secteurs de la défense bénéficient, en revanche, d’un fort regain d’activité en réponse à la montée des tensions internationales et au retour de la guerre sur le continent européen. La production de gros équipements stratégiques (sous-marins, avions, etc.) stimule tout le maillage de la sous-traitance.
Globalement, le syndicat professionnel se montre toutefois optimiste sur le long terme, avec des perspectives de croissance qui restent assez fortes pour l’électronique. Mais les besoins en formation de main-d’œuvre dans la filière sont considérables, alerte Acsiel, tant pour les fabricants de machines que pour les fabricants de composants, alors que les formations techniques ont été négligées par l’Education nationale depuis plusieurs années.
La formation de techniciens a certes fait l’objet de mesures qui vont dans le bon sens avec la mise en place, depuis la rentrée 2023, de la réforme CIEL (Cybersécurité, Informatique et réseaux, Électronique) pour les bac pro et les BTS, mais la mise en œuvre des moyens pédagogiques est très inégale selon les régions, déplore Acsiel, qui insiste sur le fait que ce point doit être traité sans délai pour éviter que la pénurie de talents ne devienne un frein majeur à la croissance de la filière.