
Le CSE d’Eolane dénonce une vente “à la découpe” et craint des licenciements

Les représentants du personnel d’Eolane France s’inquiètent de ce qu’ils appellent un “démantèlement d’un acteur majeur de l’industrie française”, après que trois offres de rachat – avec trois périmètres de reprise différents – aient été déposées. Ils jugent l’offre de Cicor comme étant “la moins défavorable”, mais craignent des licenciements.
Dans un communiqué publié hier par les CSE (comités sociaux et économiques) d’Eolane France, les représentants du personnel du sous-traitant français s’inquiètent d’un « démantèlement d’un acteur majeur de l’industrie française » depuis que le fonds d’investissement français Hivest, actionnaire majoritaire d’Eolane depuis 2017, ait décidé de « vendre à la découpe » ce groupe de sous-traitance fondé dans le Maine-et-Loire dans les années 80 et regroupant aujourd’hui plus 2500 personnes à travers le monde.
Selon les représentants du personnel d’Eolane France, l’objectif d’Hivest consiste, d’un côté, à céder Eolane France, qui compte environ 1000 personnes et fournit, pour plus de 50% de son activité, les domaines souverains français de la défense, du nucléaire et du ferroviaire, et, de l’autre, à garder trois usines rentables à l’étranger, à savoir en Chine, en Estonie et en Malaisie, avec une Holding basée au Luxembourg.
Les représentants du personnel affirment que cette opération menée par Hivest a pour but de « se libérer au plus vite des pertes des sites français, dont les restructurations successives managées par des directions mises en place par Hivest, n’ont su endiguer les difficultés économiques ». En parallèle, concernant la partie « Export », il s’agirait, pour l’actionnaire majoritaire d’Eolane, de « sauvegarder le « trésor de guerre » afin de rembourser le prêt FDES de 30M€, souscrit auprès de l’État Français, et récupérer sa mise lors d’une vente ultérieure ».

© Eolane
Toujours selon les représentants du personnel, le processus de vente d’Eolane France est en fait engagé depuis plus d’un an et a donné lieu au déclenchement d’une nouvelle conciliation « Prepack Cession » le 5 décembre 2024, menée par le Cabinet Abitbol, afin de trouver des repreneurs (il s’agit de la 3è conciliation gérée par le cabinet Abitbol pour le compte d’Hivest depuis 2017, les précédentes ayant eu lieu en 2019 et 2022).
« Ce n’est que trois mois après son déclenchement, le 3 mars 2025, au Tribunal de Commerce de Paris, que les salariés ont pu découvrir le sort qui leur était réservé, lors de la mise en cessation de paiement et mise en redressement judiciaire de la Holding France, détentrice de l’ensemble des titres des filiales France d’Eolane. La magie des conciliations pré-pack permet les négociations entre toutes les parties prenantes, acquéreurs, créanciers, actionnaires, à l’exception des salariés et des représentants », déplorent les représentants du personnel d’Eolane France.
Des licenciements sont à craindre
Depuis le 6 mars, les différents CSE peuvent consulter les offres qui doivent être consolidées dans moins de 10 jours pour le jugement le 31 mars 2025. Parmi les trois offres présentées, la majorité des CSE d’Eolane France converge pour dire que « l’offre Cicor est la moins défavorable par son périmètre de reprise, qui comprend six des sept entités françaises, face aux offres Cofidur et Synov qui ne couvrent que deux à trois entités ». Mais ils mettent en garde sur le fait que « l’urgence de la transaction, due à la situation économique actuelle d’Eolane résultant du manque d’anticipation de sa direction en 2023-2024, ne doit pas conduire à un bradage ».
Ce plan de cession porte sur un apport rapide et vital de liquidité, de la part de Cicor, mais également sur un plan de licenciement de 20% des effectifs via la mise en redressement judiciaire de trois entités sur les six reprises, ce qui concernerait 100 personnes, et sur un plan de restructuration pour le reste, qui impacterait une cinquantaine de personnes supplémentaires.
« Ce plan de licenciement ne peut s’effectuer dans l’urgence, surtout dans le contexte géopolitique actuel et à l’heure où un plan de 800 milliards d’euros pour renforcer la défense européenne va être mis en place et où le président français souhaite renforcer la défense nationale, alertent les représentants du personnel. En effet, Eolane est une entreprise dite essentielle par son positionnement dans les marchés souverains, et principalement celui de la défense. La coupe des effectifs est basée, à ce stade, sur des ratios et un carnet de commande en baisse pour les entités reprises, sur les quatre prochaines années. Difficile à accepter pour l’ensemble des salariés d’Eolane impactés, sachant que 30% du chiffre d’affaires est associé aux marchés de la défense via des clients tels que Thales, Airbus ou Nexter. Comment parler de plan de licenciement, qui sera « aveugle » au vu du planning de cession, alors que l’économie de guerre engagée par l’État Français veut trouver de la capacité industrielle pour répondre au doublement des besoins auprès des donneurs d’ordres. »
Cicor invité à améliorer son offre
Face à cet état des lieux, les représentants du personnel d’Eolane France, avec le soutien des élus locaux du Maine-et-Loire, régionaux des Pays de la Loire, et de parlementaires Européens, demandent à Cicor d’améliorer son offre en reprenant, dans un premier temps, l’ensemble du personnel des sites et, dans un deuxième temps, une fois la cession faite, d’effectuer, en partenariat avec les représentants du personnel, une restructuration nécessaire à la compétitivité et à la pérennité des entités, en prenant en compte les compétences, le savoir-faire et la complexité du marché français.